Proposer une assurance récolte aux agriculteurs
Les épisodes de grêle, en juin, puis les canicules successives ont remis sur le devant de la scène l’intérêt pour les agriculteurs de souscrire à des contratsd’assurance. Cela tombe bien, de nouvelles approches de la gestion du risque émergent. Pour un OS, se mettre au centre du jeu peut revêtir toute son importance, notamment avec une activité collecte redevenant stratégique.
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Les dernières campagnes ont confirmé l’augmentation constante de la fréquence et de l’intensité des aléas climatiques, qui peuvent parfois mettre les exploitations en grande difficulté financière. 25 à 30 % des surfaces agricoles françaises seulement (hors prairies) sont assurées par un contrat multirisque climatique, alors que selon le leader du secteur, Groupama, 60 à 65 % devraient l’être pour pérenniser le dispositif. Très variable, la cotisation d’un contrat multirisque climatique tourne autour de 50 €/t en grandes cultures, de laquelle il faut déduire la subvention de la Pac liée au contrat socle. Elle est beaucoup plus élevée en cultures spé.
1Jouer la massification
« Le premier problème, c’est la manière dont les assureurs traditionnels approchent le marché, en direct, le second, c’est que les organisations raisonnent trop par culture », indique Franck Clavier, DG de Vivadour. Il y a quatre ans, la coopérative du Gers a franchi un pas décisif en « ubérisant » les acteurs traditionnels. Elle a travaillé avec le courtier Siaci Saint Honoré pour mettre au point un contrat groupe significatif. « L’enjeu principal, appuie Franck Clavier, c’est de faire de l’anti-sélection. » À comprendre : de la massification, en proposant de couvrir toutes les cultures (80 dans le cas de Vivadour), en limitant les exclusions de garantie, et avec une franchise moins élevée (15 %). « On a pris le risque de créer un contrat groupe de 50 000 ha sur nos 100 000 ha. Mais à partir de là, on a pu aller s’assurer auprès des réassureurs mondiaux. Charge à nous de faire adhérer les agriculteurs, mais ça a marché : aujourd’hui, les trois quarts de notre territoire sont couverts par notre solution d’assurance Opti Climat », ajoute-t-il, en indiquant que tous les flux financiers, les souscriptions comme les indemnisations, passent par la coop. Un schéma atypique qui commence à faire tache d’huile…
2Des franchises abaissées
De son côté, InVivo a investi ce marché à l’automne 2018, à travers Bioline Insurance, dimensionnée pour couvrir 1 Mha d’assurance récolte, en pariant sur une mutualisation très forte. « La cible, ce sont les trois quarts des agriculteurs qui n’ont jamais trouvé un intérêt à s’assurer », pointe le DG de cette entité, Antoine Poupart. L’offre repose sur un contrat-cadre passé avec un leader mondial de la réassurance, Swiss Re Corporate Solutions. La coop intéressée souscrit un contrat collectif et présente l’offre via ses TC, les adhérents devant se connecter à une plateforme digitale pour la souscription (au moins 70 % des surfaces grandes cultures doivent être assurées) et la déclaration de sinistres.
Neuf coopératives ont répondu présent fin 2018 pour un total de 30 000 ha couverts, parmi lesquelles Océalia (lire ci-contre), ou Interval qui réserve ce contrat collectif aux adhérents s’engageant en « apport total » (hors autoconsommation). Elles seront 15 à 20 pour la récolte 2020 à intégrer ce produit d’assurance à travers leurs offres d’approvisionnement, de collecte ou de conseil. L’objectif étant d’atteindre une trentaine de coops qui assureraient 30 % de leur Scop.
Bioline propose « un même niveau de prime par hectare que ce qui est pratiqué sur le marché, mais avec une franchise nettement améliorée (10 à 15 % au lieu des 25 ou 30 % habituels) », et un éventail élargi d’aléas climatiques garantis à la culture, même en bio. Sauf le risque grêle, doté d’une franchise à la parcelle. En option, l’agriculteur pourra choisir des garanties telles que le PS, le Hagberg, les frais de resemis, etc.
3L’assurance paramétrique à regarder
En marge de l’assurance traditionnelle (contrats grêle, contrats gel ou multirisque climatique), l’assurance paramétrique, ou indicielle, commence à se développer. C’est une solution basée sur un paramètre climatique pour prémunir de manière personnalisée les agriculteurs contre les aléas. Dès que le paramètre (par exemple la température) dépasse un seuil prédéfini en fonction de la pratique culturale et de l’espèce, l’indemnisation se déclenche automatiquement, sans expertise sinistre. Si Bioline fait de la R & D sur ce sujet, Météo Protect ou Climate Insurance la développent déjà. Ces offres ne sont pas éligibles à la subvention de la Pac dans le cadre du contrat socle, mais « on peut être bien moins cher tout en proposant des franchises à 10 % », signale Charles Maury, fondateur de Climate Insurance.
4Un outil de différenciation
« Sortez de la logique de mise en relation avec un prestataire d’assurances, pour faire de ce sujet un levier stratégique afin de vous différencier, fidéliser, voire gagner des parts de marché, enjoint-il. Et n’employez plus le terme “assurance”, qui est inaudible auprès des agriculteurs. » Lui conseille de proposer une garantie intégrée dans une offre, par exemple une garantie de rendement dans un contrat d’approvisionnement (qui pourra être déclenchée aussi bien en cas d’aléas climatiques que de maladies ou ravageurs) ou alors une solution assurantielle par seuil avec une grille établie sur-mesure. « Derrière, l’OS se couvre en miroir par un contrat d’assurance qui va assurer les pertes financières qui découlent de l’engagement contractuel, de la même manière que le constructeur automobile Kia va s’assurer en miroir avec sa garantie 7 ans. »
Renaud Fourreaux
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